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Burkina/Médias : “Mon parcours arabe ne m’a pas empêché de participer au développement de mon pays” Amadé Adama Soro, journaliste à Savane média

vendredi 12 avril 2024

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Chroniqueur, éditorialiste, spécialiste des questions internationales et économiques à Savane média, Amadé Adama Soro est un journaliste qui a fait des études en arabe. Détenteur d’une maîtrise en étude arabophone, il est aussi traducteur, entrepreneur. Dans cette interview, il nous parle de sa passion pour le journalisme, ses études en arabe en Syrie et la couverture de la guerre d’Irak pour la radio Savane FM.


Lefaso.net : Pouvez-vous, vous présenter davantage ?

Amadé Adama Soro : Je suis traducteur, journaliste et promoteur de lycée le complexe scolaire et universitaire ‘’La dignité’’ créé en 2017. Pour mon parcours, j’ai fait des études en langue arabe jusqu’à la maîtrise . En plus de l’arabe, je comprends aussi l’anglais. Pour tout vous dire, après mon baccalauréat en 1996, j’ai eu une bourse pour aller faire langue arabe et études islamiques. J’ai eu une maîtrise dans ce domaine. Après cela, je me suis inscrit dans les instituts pour la communication et le journalisme. Je suis aussi titulaire d’un diplôme universitaire de traduction arabe-français de l’université Lyon 2 en France.

Qu’est-ce qui explique ce choix pour les études arabophones dans un pays qui avait le français comme langue officielle ?

Dans les premiers moments, notamment, au primaire et au secondaire, c’était le choix de mon père qui est un maître coranique. Mais avec le temps, j’ai décidé de poursuivre dans cette trajectoire. Donc, si c’était à refaire, je referais exactement la même chose. Comme vous avez pu le constater, mon parcours arabe ne m’a pas empêché de participer au développement de mon pays notamment dans le domaine de l’éducation, de la communication, de la formation et des services.

Comment expliquez-vous votre passion pour le journalisme alors que vous avez fait l’arabe ?

Ma passion pour le journalisme d’aujourd’hui date de très longtemps. Il est vrai que je n’ai pas eu le temps de faire l’école classique en français mais dans mon lycée franco-arabe, j’avais l’habitude de m’intéresser à tout ce qui touche au journalisme. J’ai beaucoup écouté Africa n°1 là ou travaillait notre compatriote Yannick Laurent Bayala. C’est à partir des années 1992, 1993 et 1994 que j’ai véritablement aiguisé ma passion pour le journalisme. Souvent, lors des matchs interclasses, je m’érigeais en journaliste même si je suis joueur de terrain. Après mon baccalauréat franco-arabe obtenu en 1996, j’ai fais mon inscription dans une université syrienne, à Damas pour faire des études arabes et islamiques. J’ai aussi fait des cours de journalisme là-bas et je m’exerçais en écriture journalistique et autres. En 2003 avec la guerre en Irak, j’étais le correspondant de la radio Savane FM à Damas où je donnais les informations liées au déroulement du conflit en français et en mooré. C’est à partir de ce moment que ma carrière en journalisme a commencé.

La langue ne vous a t-elle pas posé de problèmes au début lorsque vous avez intégré Savane FM ?

Mon principe est clair. Les langues, les sciences, nous ne naissons pas avec. Quand on est animé d’une volonté farouche, d’une passion, on peut à tout moment se faire une place au soleil. Vous savez, en termes de comparaison, l’arabe est mille fois plus compliquée que le français. Celui qui arrive à obtenir une maîtrise en arabe peut se convertir en français, je pense que c’est facile. Je n’ai pas fait l’école classique mais je lisais beaucoup. J’avais commencé à écrire de petits papiers. Pour tout vous dire, la langue n’a pas été un problème pour moi surtout que j’étais animé d’une véritable passion pour le journalisme. Sans la passion, rien n’est possible.

Comment s’est passée votre intégration à Savane FM de retour de la Syrie ?

Quand je suis arrivé à Damas en 2003, j’avais déjà des notions élémentaires en journalisme. Ce n’était pas facile parce qu’on était dans un État policier. On faisait tout pour ne pas prononcer des mots à connotation politique. De Damas, nous sommes restés en contact avec la radio Savane FM et depuis, notre collaboration continue.

Vous qui avez l’expérience de la couverture de conflits à travers la guerre d’Irak, comment appréciez-vous le comportement des journalistes burkinabè dans cette crise sécuritaire ?

J’ai eu la chance d’avoir fait deux écoles du journalisme : l’école latine incarnée par la France et l’école anglo-saxonne incarnée par les Etats-Unis et la Grande bretagne. Lors de la guerre en Irak, avant même la déclaration de la guerre, il y a eu toute une campagne de dénigrement qui avait été orchestrée contre Saddam Hussein. On s’est rendu compte que tout ce qui a été dit sur lui était du mensonge. L’information était contrôlée, il y a avait un plan de communication pour dénigrer Saddam Hussein. Comme l’a dit quelqu’un, la première victime d’une guerre, c’est la vérité. Aucun pays ne mène une guerre tout en exposant ses propres armées, troupes. Chaque pays utilise la stratégie de la manipulation, du camouflage, tout cela fait partie de la guerre.

Ce qui est reproché à certains journalistes ici, c’est de ne pas s’inscrire dans une logique d’encouragement des forces combattantes. On peut avoir sa propre opinion mais lorsqu’on sait que la parole qui va être prononcée va démotiver les troupes, ce n’est pas la peine d’en parler. Mais je pense aussi que le pouvoir public doit aussi s’inscrire dans une logique de sensibilisation et non de répression. Sinon, partout dans le monde, vous n’allez jamais voir un journaliste surtout occidental qui travaille contre son propre pays.

Certains étudiants et élèves arabophones parlent du manque de considération de leurs diplômes. Quelle est votre posture par rapport à cette analyse ?

J’ai été interpellé sur cette question plusieurs fois. J’ai une logique qui n’est pas partagée par la majorité des arabophones. Moi je ne m’assois pas pour attendre que quelqu’un vienne m’aider. J’estime aussi que tout le monde ne peut pas être employé par l’État comme j’estime que tout un chacun a un rôle à jouer dans la société et ce rôle doit être conforme à sa vocation. Au lieu de s’assoir dire que l’État doit vous employer, il faut vous même vous lever créer ce que vous pouvez créer et contribuer à votre manière, à l’édification de la nation. La question de l’équivalence des diplômes est une question chronique. Ce qu’on reproche aux étudiants en langue arabe c’est l’adéquation entre leur formation et le besoin du terrain.

Vous partez faire des études en langue arabe et vous ne parlez pas le français, vous voulez qu’on fasse comment ? Ce qu’on aurait dû faire c’est de demander à ces personnes, d’initier, d’avoir des séances de formation en langue. Moi par exemple, je n’ai pas eu ce problème parce que j’avais aussi décidé d’apprendre le français à travers la lecture. Ce qui fait que j’ai été employé comme secrétaire, traducteur dans une ambassade du golfe au Burkina Faso mais j’ai démissionné après quatre ans parce que j’avais d’autres projets. Étant employé, je n’allais jamais pouvoir réaliser ce rêve d’entreprendre. Donc, il faut se former et ne pas attendre l’État.

Vous êtes traducteur arabe-français et vice-versa. De plus en plus, on se rend compte que l’Intelligence artificielle (IA) prend du terrain dans ce domaine. Ne pensez-vous pas que l’IA va avoir raison de ce métier ?

Vous avez bien dit l’intelligence artificielle mais pas humaine. Très sincèrement, je ne pense pas. C’est comme l’apparition des robots. On avait dit que l’apparition des robots allait contribuer à la baisse de la main d’œuvre humaine. C’était pareil aussi avec l’Internet et le journal papier. Mais le journal papier continue de paraître. C’est à l’homme de s’adapter. Quelle que soit la technicité de l’IA, elle ne peut pas remplacer l’intelligence humaine. C’est vrai que cela peut amoindrir le champ d’action de l’homme mais c’est à l’homme de pouvoir tirer profit et assainir son milieu.

Qu’est-ce que la “Détentrologie” dont vous êtes le concepteur ?

C’est une discipline scientifique et artistique dont le but est de favoriser la détente de l’homme à travers des pensées à vocation philosophiques et des actions humanistes. L’idée est de trouver un pont entre les différentes disciplines pour que l’homme puisse se sentir à l’aise. C’est de décloisonner les différents champs épistémologiques pour qu’on puisse se retrouver pour travailler pour le bien de l’humanité.

Serge Ika Ki
Lefaso.net

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